Malgré les apparences, il est plus difficile d'étudier la Russie qu'un pays très lointain comme la Chine, parce que les véritables différences sont masquées par d'apparentes similitudes. La culture russe n'est pas l'altérité absolue que peuvent représenter la Chine ou le Japon. Mais ce n'est pas non plus la même chose que l'Europe occidentale. Disons, un autre nous-mêmes, une autre façon d'être Européens. On peut alors enfin renouveler un dialogue qui a été longtemps interrompu. Mais beaucoup est à reprendre presque à zéro. Les divergences de réception réciproque des idées et théories en Russie et en Europe occidentale actuellement (le Bakhtine francophone n'est pas le même que celui qu'on lit en Russie, les philosophes «post-modernes» occidentaux ne «passent pas» en Russie) montrent l'ampleur du travail de comparaison systématique qu'il reste à faire.
C'est l'entreprise qui est proposée dans ce recueil, composé à la suite des travaux d'un séminaire de 3ème cycle interuniversitaire qui s'est tenu sur le site de Crêt-Bérard (près de Vevey, Suisse) les 3 et 4 mai 2007 autour du rapport «Pensée et langage dans la culture russo-soviétique des années 1920-1930».