Abstract
La forme interne du mot et le rapport entre le langage et la pensée, deux formes centrales dans la réflexion de Potebnja, préoccupent Jakobson dès le début de ses activités scientifiques. Dans sa première monographie La poésie russe contemporaine, elles sont déjà implicitement présentes (incluant la relation entre la notion de «littérarité» et la forme interne du mot), comme l’a démontré Viktor Vinogradov dans son compte-rendu de cet ouvrage, où il qualifie Jakobson de subjectiviste dilettante pour ses emprunts à Potebnja. Des mentions explicites de Potebnja et de son rôle dans la pensée philologique formaliste et structuraliste de Jakobson prennent chez celui-ci diverses formes, à commencer par un refus catégorique à l’époque du Cercle linguistique de Moscou jusqu’à donner à Potebnja, dans les travaux de Jakobson des années 1930, le statut de précurseur du formalisme, au même titre que Andrej Belyj et Aleksandr Veselovskij. Dans mon article, j’entreprends de dégager et de repenser certaines appréciations des textes de Potebnja dans les travaux de Jakobson, appréciations qui témoignent aussi bien des méthodes qu’emploie Jakobson pour soumettre les apports intellectuels des prédécesseurs à ses propres intentions que de sa critique créatrice d’images et de contenus des conceptions adverses (psychologisme, herbartisme, etc.).

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