Entre clinicien et patient : ce que la barrière linguistique empêche, ce qu’elle permet
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Comment citer

Guerrero, O. (2022). Entre clinicien et patient : ce que la barrière linguistique empêche, ce qu’elle permet. Cahiers Du Centre De Linguistique Et Des Sciences Du Langage, (28), 117–130. https://doi.org/10.26034/la.cdclsl.2010.1328

Résumé

LES « BARRIERES LINGUISTIQUES », FIL CONDUCTEUR du présent volume, se trouvent au cœur de la clinique du Centre de soins Primo Levi, à Paris. Son équipe est pluridisciplinaire : des médecins généralistes, des psychologues cliniciens qui sont psychanalystes, un assistant social, une juriste, une accueillante et une kinésithérapeute qui interviennent auprès des mêmes patients, articulant le savoir-faire de chaque spécialité avec les autres dans une visée thérapeutique.

Les patients accueillis au Centre de soins sont des personnes victimes de la torture et de la violence politique, ils les ont subies dans leurs pays d’origine. De ce fait, le traumatisme est souvent le déclencheur de la demande de soins, même s’il laisse la place à d’autres problématiques qui apparaissent plus tard, dans le déroulement du suivi. Il est important pour nous de souligner qu’il s’agit de « personnes victimes » et non pas « victimes », c’est l’un des piliers éthiques de notre travail : nous préférons utiliser « victimes » comme un adjectif, pour ne pas réduire ces personnes à un statut qui ne fut que ponctuel, qui ne les définit pas essentiellement. Certaines langues latines différencient d’ailleurs pour le verbe « être » ce qu’il en est de l’essence et ce qui concerne un état. En traitant ce statut de « victimes » comme un état, les cliniciens du Centre Primo Levi reconnaissent à ces personnes l’humanité que les bourreaux tentèrent de nier.

Dans ce contexte, un tiers des patients suivis au Centre ne peuvent pas s’exprimer en français. Certains intervenants parlent les langues locales des pays concernés, ou bien des langues tierces, comme l’anglais, qui permettent une relation thérapeutique « classique », à deux. Mais un quart des personnes qui consultent ne trouvent pas un clinicien qui parle leur langue ou une langue commune. C’est alors que nous faisons appel à des interprètes professionnels.

Quels sont alors les enjeux lorsque la traduction fait intervenir un tiers, incarné par l’interprète, dans l’intimité duelle de la relation thérapeutique ?

https://doi.org/10.26034/la.cdclsl.2010.1328
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